Les meilleures etudes en 2023 adaptees aux soins primaires: De lequipe du groupe PEER

Chaque année, les médecins de famille sont submergés par d’énormes quantités d’articles médicaux nouvellement publiés. La recherche, la lecture et l’analyse des articles les plus pertinents sont des tâches complexes qui prennent du temps et peuvent sembler insurmontables. Cette publication présente une compilation de 10 études médicales de 2023 qui influeront très probablement sur la pratique des soins primaires, de même que des données probantes en faveur de 2 médicaments prometteurs « à venir ». Cette sélection vise à répondre aux besoins diversifiés des médecins qui exercent la médecine familiale complète et globale.

Sélection des données probantes

L’équipe du groupe PEER (Patients, Expérience, Évidence, Recherche) a systématiquement retracé des essais cliniques adaptés aux soins primaires, au moyen de recensions dans les tables des matières de revues médicales influentes (p. ex. le New England Journal of Medicine, le Lancet et BMJ). Nous avons aussi utilisé EvidenceAlerts1, ACCESSSS2 et l’American College of Physicians Journal Club3 pour trouver des articles de grande qualité. Notre équipe de professionnels des soins primaires a classé les articles par ordre d’importance, de manière indépendante. Tous les résultats présentés sont statistiquement significatifs à moins d’indications du contraire.

Message principal

Comment la prescription de statines à forte se compare-telle à une stratégie de traitement aux statines visant une cible dose chez les patients souffrant de coronaropathie?

Réponse : La prescription empirique de statines à forte intensité a des effets semblables sur les issues cardiovasculaires et la mortalité et peut être plus simple qu’une stratégie de traitement aux statines visant une cible4.

Méthodes : Dans un essai randomisé contrôlé (ERC) et ouvert, en Corée du Sud, 4400 patients atteints de coronaropathie (âge moyen de 65 ans, taux de cholestérol à lipoprotéines de faible densité [C-LDL] de 2,2 mmol/L, dont 25 % prenaient des statines à forte intensité) ont été choisis au hasard pour recevoir des statines titrées aux doses ciblées situées entre 1,3 et 1,8 mmol/L ou encore, empiriquement, des statines à forte intensité (40 mg d’atorvastatine ou 20 mg de rosuvastatine par jour).

Résultats : Les patients dans les 2 groupes ont atteint un taux moyen de C-LDL d’environ 1,8 mmol/L. Après 3 ans, les événements cardiovasculaires (8,1 c. 8,7 %) et la mortalité toutes causes confondues (2,5 % dans les 2 groupes) n’étaient pas statistiquement différents. Il était moins probable que les patients dans le groupe à cible visé prennent une statine à forte intensité (56 c. 89 %), mais plus probable qu’ils prennent l’ézétimibe (20 c. 11 %) par rapport au groupe suivant le traitement à forte intensité.

Le sémaglutide peut-il réduire les événements cardiovasculaires chez les adultes obèses non diabétiques?

Réponse : Chez des adultes obèses souffrant d’une maladie cardiovasculaire (MCV) connue, des événements cardiovasculaires se sont produits chez 6,5 % des patients prenant du sémaglutide par rapport à 8,0 % chez ceux prenant le placebo (nombre de sujets à traiter [NST] de 67)5. Un plus grand nombre de patients ont cessé le traitement en raison des effets indésirables chez ceux prenant le sémaglutide (17 %) par rapport à ceux prenant le placebo (8 %).

Méthodes : Dans un essai à double insu financé par l’industrie et effectué auprès de 17 604 adultes souffrant d’une MCV connue, mais non diabétiques (âge moyen de 62 ans, indice de masse corporelle moyen de 33 kg/m2), les patients étaient choisis aléatoirement pour prendre le sémaglutide (dose cible de 2,4 mg par semaine par voie sous-cutanée) ou un placebo.

Résultats : Après 40 mois, des événements cardiovasculaires (décès de causes cardiovasculaires, infarctus du myocarde non fatal ou AVC) se sont produits chez 6,5 % des participants prenant le sémaglutide par rapport à 8,0 % chez ceux prenant le placebo. Il n’y avait pas de différence dans la mortalité. Le poids corporel a diminué de 9 % dans le groupe avec le sémaglutide contre 1 % dans le groupe avec le placebo. Les patients prenant le sémaglutide se sont désistés en plus grand nombre en raison des effets indésirables (17 c. 8 %), surtout de nature gastro-intestinale.

Chez les adultes plus âgés, la vaccination contre le virus respiratoire syncytial (VRS) prévient-elle les maladies respiratoires?

Réponse : Après 6,7 mois, la vaccination contre le VRS avait prévenu 1 cas de maladie des voies respiratoires inférieures due au VRS pour chaque tranche de 379 patients de plus de 60 ans médicalement stables par rapport au placebo6. L’essai a été effectué durant la pandémie de la COVID-19, ce qui a potentiellement réduit l’incidence de référence du VRS. Il n’y a pas eu d’augmentation des événements indésirables graves, mais la fatigue, la douleur au site d’injection et la myalgie étaient plus fréquentes avec la vaccination.

Méthodes : L’étude était un essai financé par l’industrie auprès de 24 966 adultes âgés de 60 ans ou plus (âge moyen de 70 ans, dont 39 % avaient des problèmes stabilisés, mais susceptibles d’accroître le risque d’une infection grave au VRS) qui ont été répartis aléatoirement pour recevoir une dose unique d’un vaccin adjuvanté à base de protéine F du VRS stabilisée en conformation préfusion ou encore un placebo. L’essai devait se poursuivre sur 3 ans, mais les résultats ont été présentés après la première saison du VRS.

Résultats : Des cas de maladies des voies respiratoires inférieures liées au VRS se sont produits chez 0,06 % des patients qui ont reçu le vaccin par rapport à 0,3 % chez ceux à qui un placebo a été administré (nombre de sujets à vacciner de 379). Une infection grave au VRS (>2 signes cliniques ou évaluée par les chercheurs) a été signalée chez 0,008 % de ceux qui ont reçu le vaccin par rapport à 0,14 % avec le placebo (nombre de sujets à vacciner de 758). Les effets indésirables les plus courants étaient la douleur au site de l’injection (61 c. 9 % avec le placebo), la fatigue (34 c. 16 %) et la myalgie (29 c. 8 %). Il n’y avait pas de différence dans les événements indésirables graves. Les patients immunodéprimés, ceux ayant des comorbidités non stabilisées ou ceux qui résidaient dans des établissements de soins de longue durée n’étaient généralement pas inclus.

Le chlorthalidone est-il supérieur à l’hydrochlorothiazide pour la réduction du risque cardiovasculaire?

Réponse : La survenance des événements cardiovasculaires majeurs ou du décès n’est pas diminuée par le chlorthalidone comparé à l’hydrochlorothiazide7.

Méthodes : Dans un ERC ouvert, 13 523 anciens combattants (âge moyen de 72 ans, 11 % ayant des antécédents de MCV) qui prenaient déjà de l’hydrochlorothiazide (25 à 50 mg par jour) ont été choisis au hasard pour recevoir 12,5 à 25 mg de chlorthalidone ou pour continuer avec l’hydrochlorothiazide.

Résultats : Après 2,4 ans en moyenne, les événements cardiovasculaires (10,4 c. 0,0 %) et le décès toutes causes confondues (6,6 % dans les 2 groupes) n’étaient pas statistiquement différents avec le chlorthalidone comparé à l’hydrochlorothiazide.

L’amitriptyline améliore-t-elle les symptômes du syndrome du côlon irritable (SCI)?

Réponse : L’amitriptyline à faible dose (10 à 30 mg au coucher) améliore les symptômes du SCI chez les patients qui n’ont pas obtenu suffisamment d’améliorations avec les traitements de première intention8.

Méthodes : Dans un ERC auprès de 463 patients souffrant du SCI chez qui les traitements de première intention avaient échoué (100 % avaient essayé des changements à l’alimentation, 78 % avaient essayé des antispasmodiques), on a administré aléatoirement de l’amitriptyline (10 mg au coucher, titrée sur une période de 3 semaines jusqu’à un maximum de 30 mg) ou encore un placebo. Les 2 groupes ont aussi reçu des conseils sur l’alimentation. Au point de départ, le score moyen selon le système de notation de la sévérité du SCI était d’environ 273 (sur une échelle de 0 à 500), soit des symptômes de modérés à sévères.

Résultats : Après 6 mois, l’amitriptyline était supérieure au placebo, et environ 60 % des patients avaient obtenu un soulagement des symptômes par rapport à 45 % chez ceux qui avaient pris un placebo (NST de 7). En outre, un plus grand nombre de patients qui avaient pris de l’amitriptyline avaient connu un soulagement adéquat de leurs symptômes durant 50 % des semaines par comparaison avec ceux ayant reçu un placebo (41 c. 30 %, NST=10). Un plus grand nombre de patients trouvaient acceptable de prendre de l’amitriptyline et voulaient continuer à le faire (58 c. 47 % de ceux qui prenaient le placebo, NST=10). La sécheresse buccale, la somnolence et la vision brouillée étaient plus fréquentes avec l’amitriptyline.

Les opioïdes sont-ils efficaces pour la douleur au cou ou la lombalgie aiguë?

Réponse : Les opioïdes n’étaient pas supérieurs au placebo dans la prise en charge de la douleur aiguë au cou ou au bas du dos après 6 semaines9.

Méthodes : Un ERC à triple insu non financé par l’industrie (346 participants, âge moyen de 45 ans, score de douleur moyen de 5,7 sur une échelle de 0 à 10 points) comparait l’oxycodone-naloxone avec un placebo chez des adultes souffrant de douleur aiguë au cou ou au bas du dos. Des comprimés à libération modifiée d’oxycodone-naloxone étaient titrés jusqu’à 10 mg 2 fois par jour. Le traitement était interrompu lorsque la douleur disparaissait (score de 0 ou 1 pendant 3 jours consécutifs) ou après 6 semaines.

Résultats : Après 6 semaines, il n’y avait pas de différence significative dans l’intensité de la douleur entre les groupes (2,8 avec l’oxycodone et 2,3 avec le placebo), et la douleur était pire avec les opioïdes après 1 an (2,4 avec l’oxycodone et 1,8 avec le placebo). En fonction de paramètres comme le fonctionnement, la qualité de vie, l’utilisation des soins de santé, l’absentéisme et d’autres, les résultats étaient les mêmes ou pires (pour 1 mesure du fonctionnement physique et de la qualité de vie) dans le groupe prenant des opioïdes. Les effets indésirables n’étaient pas différents; par ailleurs, un plus grand nombre de participants étaient à risque d’un usage abusif d’opioïdes (score ≥9 selon l’échelle actuelle de mesure de l’usage abusif d’opioïdes) après 1 an avec l’oxycodone (20 c. 10 % avec le placebo, nombre nécessaire pour nuire de 10).

Les patients qui ont des allergies à faible risque à la pénicilline peuvent-ils subir en toute sécurité un test de provocation orale?

Réponse : Pour les patients dont l’allergie à la pénicilline est à faible risque, un test de provocation orale avec de 250 à 500 mg d’amoxicilline a une innocuité semblable à celle d’un test cutané standard à la pénicilline10.

Méthodes : Le PENFAST (Penicillin Allergy Decision Rule) est un outil d’aide à la décision clinique qui permet l’évaluation d’une allergie à la pénicilline au point de service chez les adultes. Dans un ERC ouvert auprès de 382 adultes ayant un score PENFAST de moins de 3, la plupart des patients avaient des scores PENFAST de 1 ou moins (96 %), principalement de faibles réactions de longue date (>15 ans) à la pénicilline n’exigeant aucun traitement. Les patients ayant des antécédents d’anaphylaxie (quel que soit le médicament) ou qui avaient des réactions non médiées par l’immunoglobuline E étaient exclus. Les patients étaient choisis aléatoirement pour subir un test de provocation orale (principalement avec de 250 à 500 mg d’amoxicilline) ou un test intradermique suivi par une provocation à l’amoxicilline, si les résultats dermiques étaient négatifs. Les patients étaient en observation pendant 60 minutes.

Résultats : Dans chaque groupe, 1 patient a obtenu des résultats positifs à la provocation orale (dans les 2 cas, de faibles réactions cutanées durant l’heure suivant l’ingestion, qui se sont résorbées avec une seule dose d’antihistaminiques). Des réactions à retardement médiées par le système immunitaire se sont produites chez 5 % des patients dans les 2 groupes (9 c. 6 cas [groupe témoin] ont eu besoin d’antihistaminiques, mais aucune hospitalisation ou visite au département d’urgence n’a été nécessaire). L’étiquette d’allergie à la pénicilline a été annulée pour plus de 98 % des patients dans les 2 groupes.

Le spironolactone pour l’acné faciale chez la femme

Réponse : Après 24 semaines, le spironolactone avait entraîné une amélioration de l’acné selon une autoévaluation chez environ 80 % des femmes par comparaison à environ 60 % chez celles prenant le placebo11.

Méthodes : Dans un ERC à double insu, 410 femmes adultes présentant de l’acné au visage (âge moyen de 29 ans et environ 53 % ayant une acné de modéré à sévère) ont été choisies aléatoirement pour prendre du spironolactone (50 mg par jour pendant 6 semaines, puis 100 mg par jour) ou un placebo.

Résultats : Après 6 mois, 82 % des participantes prenant du spironolactone ont signalé une amélioration globale par rapport à 63 % chez celles prenant le placebo (NST=6). L’évaluation globale par les chercheurs concluait une amélioration globale chez 19 % des participantes prenant le spironolactone par rapport à 6 % dans le groupe sous placebo (NST=8) après 12 semaines, mais ce paramètre n’a pas été mesuré après 24 semaines. Environ 20 % des participantes qui ont pris du spironolactone ont dit avoir eu des céphalées en comparaison de 12 % chez celles prenant un placebo.

Chez les adultes plus âgés, la fragilité peut-elle être inversée par une intervention éducative comportant de l’exercice et l’ingestion de protéines?

Réponse : La recommandation de faire des exercices contre résistance et de marcher, accompagnée d’une ingestion régulière de protéines, peut réduire et inverser la progression de la fragilité12.

Méthodes : Un ERC ouvert (N=168, âge moyen de 77 ans, dont 17 % étaient fragiles) effectué auprès de personnes en soins primaires de 65 ans ou plus et dont les scores de fragilité selon l’échelle de fragilité clinique13 étaient de 5 ou moins (légèrement fragiles ou moins fragiles), ont été choisies au hasard pour participer à une intervention éducative ou encore pour recevoir les soins habituels pendant une période de 3 mois. L’intervention comprenait un régime d’exercices à domicile (10 exercices de force 4 jours par semaine ou plus et une marche de 30 à 45 minutes de 3 à 4 fois par semaine14), de même que des conseils sur l’ingestion de protéines alimentaires (1,2 g/kg de poids corporel par jour). Des médecins de famille offraient l’éducation sous forme de brochures et de démonstrations (dans l’ensemble ≤5 minutes). Le paramètre principal était le nombre de participants considérés fragiles selon l’instrument de mesure de la fragilité SHARE (Survey of Health, Ageing and Retirement in Europe)15.

Résultats : Après 3 mois, 6 % étaient considérés fragiles dans le groupe de l’intervention par rapport à 18 % dans celui recevant les soins habituels (NST=9). Dans le groupe de l’intervention, 92 % des participants ont dit s’être bien conformés aux consignes, et 66 % étaient d’avis que l’intervention était « facile ou très facile » à entreprendre.

Prise en charge des maladies chroniques en Alberta

Réponse : Les médecins de famille jouent un rôle important dans la prise en charge des maladies chroniques en dispensant la majorité des soins aux patients souffrant d’hypertension, de diabète, d’asthme ou de maladies pulmonaires obstructives chroniques16.

Méthodes : Dans une étude rétrospective de cohortes auprès de 970 783 Albertains adultes, des données administratives ont servi à déterminer la spécialité des médecins qui dispensaient des soins longitudinaux (≥2 visites au même médecin sur 5 ans) pour 7 maladies chroniques en particulier.

Résultats : Les médecins de famille étaient les seuls médecins pour la plupart des patients souffrant d’hypertension (86 %), de diabète (71 %), d’asthme (66 %) et de maladies pulmonaires obstructives chroniques (60 %). D’autres spécialistes étaient le plus souvent les seuls médecins pour la cardiopathie ischémique (49 %), l’insuffisance cardiaque (36 %) et la néphropathie chronique (42 %), quoique des médecins de famille aient participé à leurs soins (soit une prise en charge conjointe avec un autre spécialiste ou comme seul médecin) dans le cas de 51, 64 et 58 % des patients, respectivement. Il convient de signaler que certains auteurs de cette étude sont aussi des coauteurs de cet article.

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