La sante planetaire dans les soins primaires

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Je veux que vous agissiez comme si nous étions dans une crise. Je veux que vous agissiez comme si notre maison était en feu. Parce qu’elle l’est.

                                                                                                   Greta Thunberg

Ella Roberta Adoo Kissi Debrah est décédée à Londres (Angleterre) en 2013, à l’âge tendre de 9 ans. Même si la cause immédiate du décès a été attribuée à une exacerbation de l’asthme, le rapport du coroner a spécifiquement mentionné que l’une des causes était la pollution de l’air, une première jusqu’alors. Le rapport concluait que le décès d’Ella était attribuable à l’asthme auquel l’exposition à une pollution excessive de l’air avait contribué1.

Comme le raconte sa mère dans une entrevue avec The Guardian2, l’un des souhaits d’Ella sur son lit de mort était que sa fratrie et ses amis se souviennent d’elle. Le 9 février 2024, presque 11 ans après le décès d’Ella, le maire de Londres a présenté des excuses à la mère d’Ella pour les niveaux d’air toxique contraires à la loi près de son domicile3. Un projet de loi sur la qualité de l’air, appelé la loi d’Ella, fait présentement l’objet de débats au Parlement du Royaume-Uni3.

Il est maintenant établi que la santé humaine est intimement liée à celle de la planète. Dans sa commission historique sur la santé planétaire, le Lancet a défini simplement la santé planétaire comme étant la santé de la civilisation humaine et l’état des systèmes naturels desquels elle dépend4. Ce même rapport expliquait aussi clairement les raisons pour lesquelles la santé planétaire sera pire pour ceux qui vivent dans des communautés et des nations où les droits à l’équité sont bafoués.

La responsabilité des médecins de famille de se préoccuper de la santé planétaire et de militer dans le domaine du changement climatique gagne en intensité. L’Organisation mondiale des médecins généralistes (WONCA-Europe) a récemment publié sa définition 2023 des termes pratique générale et médecine familiale5. La définition révisée met un accent renouvelé sur la santé planétaire en précisant que les médecins de famille ont une responsabilité envers leur communauté et leur environnement. L’actualité reconnaît que nous soignons nos patients dans le contexte d’un écosystème et que nous servons de modèles à imiter lorsqu’il s’agit d’adopter un mode de vie durable5.

Par le passé, Le Médecin de famille canadien a publié des articles sur l’environnement et la santé, de même que du contenu portant sur la crise climatique6,7. À mesure que la crise s’intensifie et continue de s’aggraver, il est primordial de faciliter un dialogue ouvert et une érudition dans ce domaine. C’est pourquoi, au cours des mois et des années qui viennent, nous renouvellerons notre engagement à publier des travaux de grande qualité sur la santé planétaire. Avec l’arrivée du Jour de la Terre le 22 avril, le présent numéro servira de lancement pour ces efforts.

Les sommaires narratifs des données probantes par Anawati et ses collègues (page 239) présentent un référentiel en fonction duquel les médecins de famille peuvent passer à l’action dans le domaine de la responsabilité environnementale, y compris aux niveaux micro, méso et macro8. Par exemple, sur le plan micro, nous pouvons prescrire des inhalateurs à poudre sèche plutôt que des aérosols doseurs, tandis qu’au niveau macro, nous pouvons plaider en faveur d’une énergie verte. Hale et ses collègues (page 233) expliquent pourquoi les médecins de famille occupent une position privilégiée en tant que leaders à cet égard9 : lorsque nous déprescrivons, que nous limitons les examens inutiles et que nous pratiquons la médecine préventive, non seulement est-ce bon pour la santé de nos patients, mais aussi pour la santé de la planète grâce à la réduction en amont de la consommation de combustibles fossiles. Selon les auteurs, le simple fait de faire subir un test de laboratoire ou de prescrire un médicament utilise de grandes quantités d’énergie et de ressources9. Certains d’entre nous agissent déjà peut-être en leaders de la santé planétaire en exerçant simplement une bonne médecine et en utilisant judicieusement les ressources.

Dans l’essai du Troisième rail (page 271) sur les dangers des combustibles fossiles, le Dr Myles Sergeant propose d’autres mesures que peuvent prendre les médecins de famille10, comme en décourageant leur consommation dans l’industrie des soins de santé et en mettant un terme aux investissements dans ce secteur, tant dans les établissements où nous travaillons (p. ex. hôpitaux ou universités) qu’avec leurs fournisseurs. Nous pouvons aussi faire une différence en nous assurant que nos investissements personnels ont une faible empreinte carbone. Le Dr Sergeant conclut son essai par la question : « Si les médecins canadiens ne font pas leur part, qui le fera? »

Les opinions exprimées dans les éditoriaux sont celles des auteurs. Leur publication ne signifie pas qu’elles soient sanctionnées par le Collège des médecins de famille du Canada.

Références à la page 222.

This article is also in English on page 222.

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