Validité d’un outil de repérage rapide de l’insuffisance d’activité physique et de la sédentarité en médecine générale

L’inactivité physique, ou insuffisance d’activité physique (AP), est définie comme un niveau insuffisant d’AP, inférieur au seuil recommandé. Elle est donc à différencier de la sédentarité qui est définie par une situation d’éveil caractérisée par une dépense énergétique faible (inférieure à 1,6 MET) en position assise ou allongée [1].

L’insuffisance d’AP et la sédentarité sont des facteurs de risque de nombreuses maladies. La pratique d’une AP et la réduction du temps de sédentarité sont efficaces dans la prévention et le traitement de nombreuses pathologies chroniques. L’AP réduit le risque de mortalité toutes causes confondues, avec un effet dose-dépendant, et améliore la qualité de vie. La diminution du temps passé assis à réaliser des activités sédentaires diminue le risque de mortalité toutes causes confondues et plus particulièrement la mortalité cardiovasculaire [2].

Selon le rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) publié en 2022, en France, 70 % des femmes et 42 % des hommes sont en deçà des niveaux d’AP. Seuls 5 % des adultes ont une activité physique suffisante pour être protectrice. Les adultes insuffisamment actifs, et dont les temps de sédentarité s’avèrent élevés, s’exposent au cumul de ces deux facteurs de risque [3]. Les résultats de ce rapport s’inscrivent par ailleurs en cohérence avec l’observation populationnelle réalisée par Santé publique France, dans le cadre de l’étude Esteban en 2017. Celle-ci rendait compte de niveaux d’activité physique faible et d’une sédentarité élevée, et mettait en évidence une dégradation de la situation par rapport à l’étude nationale nutrition santé de 2007 [4].

L’efficacité reconnue de l’AP et de la limitation du temps de sédentarité, comme moyen de prévention et de thérapeutique de nombreuses pathologies et états morbides, a conduit l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à édicter des recommandations de pratique [5].

Emmener une large partie de la population à atteindre ces recommandations internationales est un objectif de soins primaires largement validé et d’autant plus pertinent que les pathologies et facteurs de risque, pour lesquels l’AP et la limitation de la sédentarité ont fait preuve d’efficacité, sont extrêmement prévalentes en population générale.

La mesure de l’AP est une nécessité pour évaluer le niveau d’AP des patients par rapport à ces recommandations.

Il existe plusieurs méthodes de mesure de l’AP.

Les mesures objectives sont :

la méthode de la calorimétrie indirecte, considérée comme le « gold standard » pour la mesure de l’AP, ainsi que la méthode de l’eau doublement marquée, nécessitent des laboratoires spécialisés et des expertises spécifiques. Elles sont fiables, mais coûteuses, et ne sont pas utilisables en pratique de soins courants ;

le podomètre est simple d’utilisation, peu coûteux, mais peu fiable car il ne permet pas de détecter la nature et l’intensité de l’AP, ni le temps passé en AP ;

l’accéléromètre permet d’enregistrer les accélérations et les décélérations occasionnées par les mouvements du sujet. Il est de petite taille, s’adapte facilement dans les conditions de la vie courante. Cette méthode semble être le meilleur compromis, mais elle reste coûteuse et chronophage, et par conséquent, plus adaptée à la recherche clinique qu’au soin [6].

Les mesures déclaratives, plus subjectives, sont plus couramment utilisées. Ce sont des questionnaires de mesure de l’AP. On en retrouve un grand nombre dans la littérature. L’IPAQ et le GPAQ sont les seuls à avoir été validés dans plusieurs langues et comparés à l’accéléromètre [7], [8], [9], [10], [11]. Cependant, ils sont relativement longs, et donc difficilement utilisables lors d’une consultation de médecine générale.

Une revue systématique de littérature de Smith et al. publiée en 2017 [12], et une réactualisation de celle-ci dans un travail de thèse réalisé par Mathilde Méné et Lucie Crousier en 2023 [13], montrent qu’aucun de ces questionnaires n’est assez validé, fiable et rapide pour être utilisé dans un contexte de soins primaires.

Un questionnaire court, en deux questions, le Brief Physical Activity Assessment Tool (BPAAT) ou questionnaire de Marshall a déjà été validé en Australie, dans sa langue d’origine, en comparaison à l’accélérométrie [14].

Certains auteurs ont proposé de développer une procédure de repérage précoce et d’intervention brève (RPIB) auprès de personnes insuffisamment actives. Cette procédure a déjà fait preuve de son efficacité dans de nombreux domaines [15], [16]. Ainsi, Laure P. propose pour ce repérage d’associer une question « faites-vous une activité physique ? » au questionnaire de Marshall [17].

L’Union régionale des professionnels de santé (URPS) de Nouvelle-Aquitaine, propose, avec son outil de repérage Med Prev®, une série de questions pour évaluer le niveau d’AP et la sédentarité des patients [18].

Il n’y a pas à notre connaissance de test de repérage de la sédentarité. Dans la plupart des travaux, elle est mesurée par le temps quotidien passé assis ou couché en dehors du temps de sommeil. C’est d’ailleurs de cette manière que la sédentarité est évaluée dans les tests IPAQ (« Au cours des 7 derniers jours, combien de temps avez-vous passé assis pendant un jour de semaine ? ») et GPAQ (« Combien de temps passez-vous en position assise ou couchée lors d’une journée habituelle ? »). Pour de nombreux auteurs, le niveau de sédentarité est corrélé avec le temps passé devant les écrans [19], [20].

Une évaluation de ce temps pourrait aussi être un moyen d’évaluation de la sédentarité. Le temps d’écran est, avec le temps passé assis, un des moyens utilisés par l’outil Med Prev® pour évaluer la sédentarité. De nombreux auteurs donnent 7 heures de temps quotidien passé assis comme seuil pour parler de comportement sédentaire [21].

L’objectif principal de notre étude était de comparer la capacité du test de Marshall à classer les patients en suffisamment ou insuffisamment actifs, par rapport aux tests validés que sont l’IPAQ et le GPAQ.

Les objectifs secondaires étaient de :

déterminer si l’adjonction d’une troisième question sur l’inscription dans un club ou une association sportive était en mesure d’améliorer ce classement ;

tester une autoévaluation de l’AP (de 0 à 10) comparativement au Marshall à l’IPAQ et au GPAQ ;

tester une question de repérage rapide de la sédentarité en association au test de repérage rapide de l’AP ;

tester la faisabilité de ce repérage en pratique de soins primaires.

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