Formation en habiletes techniques pendant la residence: Introduction dune clinique dhabiletes techniques pour ameliorer les competences techniques

Le référentiel du Cursus Triple C axé sur le développement des compétences du Collège des médecins de famille du Canada identifie les habiletés techniques comme une dimension essentielle de la compétence des médecins de famille, précisant que les résidents doivent atteindre la compétence dans plusieurs interventions avant la fin de leur formation.1,2 Toutefois, aucun consensus n’a été atteint quant à la méthode optimale pour enseigner ces compétences. Cette situation est regrettable, car il a été démontré que la formation aux habiletés techniques pendant la résidence accroît les probabilités que les médecins finissent par pratiquer ces interventions dans leur pratique autonome.3,4

À l’heure actuelle, la plupart des médecins de famille n’exécutent pas d’épreuves diagnostiques ou thérapeutiques, citant le manque de formation ou de compétences actualisées comme raisons principales.5,6 Cette situation a contribué à la diminution observée du nombre et de la diversité des interventions pratiquées dans le cadre des soins ambulatoires.6

Données probantes

La littérature sur la formation aux habiletés techniques pendant la résidence est peu abondante. Les nouveaux étudiants commencent la résidence avec des niveaux divers d’exposition aux habiletés techniques à la faculté de médecine; dans la plupart des cas, cette exposition antérieure est marginale.7 On ne sait pas exactement quelle proportion des programmes de résidence en médecine de famille offre une formation dédiée aux habiletés techniques, ce qui est préoccupant puisque les pratiques des résidents offrent généralement moins d’occasions de procéder à des interventions chirurgicales que les pratiques des médecins traitants.8 Heureusement, les résidents qui reçoivent une formation pratique directe sur les interventions chirurgicales font état d’une plus grande aisance et d’une plus grande compétence dans ces interventions.9 Il n’est pas surprenant qu’une telle formation fasse en sorte que les résidents sont plus susceptibles d’offrir ces options à leurs patients10,11 Enfin, il convient de considérer l’incidence d’un prolongement potentiel du programme de formation postdoctorale qui passerait de deux à trois ans. Même si ce prolongement donnait naturellement plus de temps aux résidents pour améliorer et consolider leurs habiletés techniques, il n’y a pas de données, à notre connaissance, qui indiquent que des niveaux de compétences semblables ne pourraient pas être atteints dans un laps de temps plus court avec une exposition et une formation intentionnelles.

Notre expérience

Alors que notre programme de résidence en médecine de famille évoluait vers un modèle axé sur le développement des compétences, nous étions de plus en plus préoccupés par le fait que nos résidents n’acquéraient pas suffisamment d’expérience pour atteindre une véritable compétence dans un certain nombre d’habiletés techniques de base. Les résidents eux-mêmes ont également exprimé qu’ils ne se sentaient pas préparer à effectuer certaines de ces interventions, et pour les pratiquer de façon autonome après l’obtention de leur diplôme. Pour répondre à cette préoccupation, nous avons créé une clinique d’habiletés techniques sur notre site de formation en médecine de famille (Réseau universitaire de santé—Équipe de santé familiale de Toronto Western à l’Université de Toronto en Ontario). Notre objectif était de veiller à ce que tous nos résidents soient suffisamment exposés aux habiletés techniques de base identifiées pour atteindre le niveau de compétence requis.

La clinique a été mise à l’essai pour la première fois au cours de l’année universitaire 2013-2014. Nous avons recruté quatre superviseurs ayant une expérience des habiletés techniques pour la clinique. Aucun de ces superviseurs n’avait de formation spécialisée; ils avaient plutôt accumulé de l’expérience grâce à la pratique clinique, à la formation médicale continue et aux activités de mentorat. La clinique avait lieu toutes les deux semaines au cours de la première année de stage des résidents en médecine de famille de base. En combinant les priorités pédagogiques et les besoins cliniques de notre unité, nous avons déterminé quelles interventions seraient proposées ou réalisées : biopsies et excisions de lésions cutanées, injections articulaires, biopsies endométriales et insertions de dispositifs intra-utérins.

Nous avons demandé que des patients soient orientés à notre clinique (c’est-à-dire qu’on a demandé aux médecins traitants d’orienter leurs patients à notre clinique d’habiletés techniques plutôt que d’effectuer eux-mêmes les interventions indiquées). Ceci a permis de concentrer les interventions dans les cliniques dédiées aux résidents et ainsi fournit une exposition et une formation délibérées.

Dans notre première cohorte, 10 résidents de première année ont été divisés en deux groupes. Le groupe d’intervention pratiquait dans la clinique d’habiletés techniques, alors que le groupe témoin a continué à effectuer ces interventions dans leurs cliniques habituelles sur une base ad hoc. Des sondages préinterventions et postinterventions ont été administrés aux deux groupes, examinant le nombre d’interventions réalisées pendant les six mois du projet pilote et la confiance subjective des résidents envers leurs compétences sur une échelle de 1 à 10. Les données recueillies dans l’outil de suivi des patients en ligne du programme de résidence ont également été comparées avant et après l’intervention pour les deux groupes. Les habiletés techniques ont été évaluées et enregistrées à l’aide des notes de terrain normalisées, mais celles-ci n’ont pas été formellement comparées entre les groupes en raison de la grande variabilité du nombre et du type d’interventions effectuées.

L’introduction d’une clinique d’habiletés techniques en particulier dans le programme de résidence en médecine de famille de notre site semble avoir augmenté l’exposition des résidents à plusieurs interventions normalisées en cabinet (Figures 1 et 2). Elle a également augmenté leur niveau de confiance dans l’exécution de ces interventions, ainsi que leur préparation subjective à la pratique sur une échelle de 1 à 10 (Figures 3 et 4).

Figure 1.Figure 1.Figure 1.

Interventions réalisées par le groupe clinique d’habiletés techniques par rapport au groupe témoin

Figure 2.Figure 2.Figure 2.

Nombre d’interventions réalisées durant la période de collecte de données

Figure 3.Figure 3.Figure 3.

Confiance subjective dans les groupes cliniques d’habiletés techniques : Autoévaluation des résidents quant à leur confiance sur une échelle de 1 à 10.

Figure 4.Figure 4.Figure 4.

Préparation à la pratique des groupes cliniques d’habiletés techniques par rapport aux groupes témoins : Autoévaluation des résidents quant à leur préparation à pratiquer sur une échelle de 1 à 10.

Compte tenu de ces résultats, la clinique d’habiletés techniques a été intégrée à notre programme de formation de base et a connu un franc succès au cours des années qui ont suivi sa mise en œuvre. Dans l’intervalle, nous avons eu recours à une démarche itérative d’amélioration de la qualité pour résoudre certains des problèmes rencontrés au cours des années précédentes. Par exemple, il nous arrivait de recevoir des patients qui correspondaient mieux aux compétences des dermatologues et des chirurgiens plasticiens. Nous avons donc peaufiné notre processus d’orientation (en élaborant un formulaire d’orientation normalisé énumérant les services fournis) afin de réduire au minimum le nombre de ces orientations. Nous avons également créé des fiches d’information pour les patients afin qu’ils sachent à quoi s’attendre après avoir été orientés (y compris les coûts potentiels pour les services non couverts par l’Assurance-santé de l’Ontario), et nous avons travaillé afin de maintenir et d’accroître le nombre de nos patients et les compétences de nos superviseurs.

La clinique d’habiletés techniques continue d’être très active et bien cotée par nos résidents. Depuis sa création, un total de 801 patients ont bénéficié des services de nos résidents, lesquels ont procédé à des biopsies ou des excisions de 450 lésions cutanées, traité 145 acrochordons ou verrues, excisé 116 kystes, effectué 28 biopsies endométriales, inséré 24 dispositifs intra-utérins, procédé à 32 injections articulaires et pratiqué cinq circoncisions.

Conclusion

L’introduction d’une clinique d’habiletés techniques consacrée au programme de résidence en médecine de famille permet une exposition et un enseignement ciblés et renforce les compétences techniques, augmentant ainsi la confiance des résidents dans l’exécution de ces interventions. D’autres programmes pourraient envisager de mettre en œuvre d’une clinique semblable afin d’augmenter la probabilité que leurs apprenants offrent ces services aux patients dans leurs futures pratiques autonomes.

Les médecins qui travaillent en milieu communautaire peuvent s’inspirer de notre modèle en établissant une liste des interventions proposées à transmettre à leurs collègues, en mettant en œuvre une clinique régulière à laquelle leurs collègues pourraient s’adresser, puis en augmentant la capacité et la fréquence au besoin. Le Tableau 1 fournit une liste d’outils et de ressources pour y arriver.

Tableau 1.

Outils et ressources

NotesConseils pour les enseignants

▸ Les habiletés techniques sont reconnues comme une compétence essentielle pour les résidents en médecine de famille et la formation pendant la résidence augmente la probabilité que les médecins effectuent des interventions dans leur pratique. Toutefois, aucun consensus n’a été atteint quant à la méthode optimale pour enseigner ou acquérir ces compétences.

▸ Les auteurs ont mis à l’essai une clinique d’habiletés techniques à un site de formation, offraient aux résidents une exposition et une formation délibérées à l’exécution de plusieurs épreuves diagnostiques et thérapeutiques, ce qui leur a permis d’acquérir à la fois des compétences et de la confiance grâce à une expérience concentrée.

▸ Des ressources et des outils étaient disponibles pour d’autres superviseurs qui souhaitaient intégrer les cliniques d’habiletés techniques dans leurs sites d’enseignement afin d’aider les résidents à acquérir ces habiletés techniques essentielles.

Occasion d’enseignement est une série trimestrielle publiée dans Le Médecin de famille canadien, coordonnée par la Section des enseignants du Collège des médecins de famille du Canada (CMFC). La série porte sur des sujets pratiques et s’adresse à tous les enseignants en médecine familiale, en mettant l’accent sur les données probantes et les pratiques exemplaires. Veuillez faire parvenir vos idées, vos demandes ou vos présentations à Dre Viola Antao, coordonnatrice d’Occasion d’enseignement, à viola.antaoutoronto.ca

Footnotes

Remerciements

Nous remercions la Dre Jessica Roy et l’auteure, la Dre Jennifer Sy qui ont participé à la création et à l’évaluation de la clinique d’habiletés techniques, dans le cadre d’un projet de recherche sur la résidence.

Intérêts concurrents

Aucun déclaré

The English version of this article is available at https://www.cfp.ca on the table of contents for the April 2023 issue on page 292.

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