Limportance des symptomes en medecine familiale

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Lorsque j’ai quitté l’hôpital, j’en connaissais beaucoup. Le problème était que le patient n’avait rien de ce que je connaissais.

                                                                                                     Dr Martin Bass*

Un des aspects les plus intéressants et difficiles de la médecine familiale est la prise en charge des symptômes des patients.

Kathryn Montgomery, dans son remarquable ouvrage How Doctors Think, a décrit la pratique de la médecine comme n’étant ni science ni art, mais ce qu’Aristote appelait la phronesis, soit une « sagesse pratique », éclairée par la science et la recherche1. Si tel est le cas, quels sont les principaux éléments de la sagesse pratique du médecin de famille compétent? La Dre Iona Heath a écrit que l’habileté première du praticien généraliste est de patrouiller dans les frontières entre les symptômes et les maladies que nous pouvons diagnostiquer et traiter, et entre les maladies que nous pouvons diagnostiquer et traiter et celles qui exigent des soins spécialisés ou hospitaliers2.

Les médecins de famille généralistes voient et prennent en charge des symptômes autant qu’ils voient et prennent en charge des maladies; cela deviendra probablement encore plus difficile dans la mesure où la population continue de vieillir et où les personnes vivent avec plusieurs maladies ou problèmes chroniques. Pourtant, l’éducation médicale prédoctorale et postdoctorale pour les médecins de famille se concentre principalement sur les maladies et non sur les symptômes, limitant ainsi le développement de notre sagesse pratique généraliste. Il est important de comprendre les maladies et leurs présentations habituelles, mais pour les médecins de famille, la compréhension des symptômes et de leur évolution naturelle est aussi essentielle. Pourquoi? Comment pouvons-nous renforcer cet aspect de notre formation et de notre pratique?

Dans un commentaire précédent paru dans Le Médecin de famille canadien3, les Drs Thomas R. Freeman et Moira Stewart* ont expliqué que l’évaluation et, si possible, l’atténuation des symptômes sont une portion considérable du travail que font les médecins de famille, mais jusqu’à tout récemment, très peu de recherche a été faite sur les symptômes. Heureusement, la situation est en train de changer grâce à 2 facteurs principaux : de grandes bases de données regroupées et anonymisées, tirées des dossiers médicaux électroniques, et un système de codage qui permet l’enregistrement du motif des rencontres, y compris les symptômes (Classification internationale des soins primaires)4.

Le Médecin de famille canadien de ce mois présente une importante étude de recherche effectuée par les Drs Freeman et Stewart et leurs collègues de l’Université Western à London (Ontario), qui décrit l’évolution naturelle de la douleur abdominale, l’un des symptômes les plus courants que voient les médecins de famille (page 342)5. Cette étude rétrospective de cohortes, effectuée sur une période de 4 ans, impliquait des patients qui avaient présenté des douleurs abdominales à 18 médecins de famille dans 8 pratiques en groupe, situées dans le sud-ouest de l’Ontario. Les auteurs ont distingué et étudié 3 sous-types et « trajectoires » de la douleur abdominale qui différaient de manières cliniquement importantes. Voici peut-être leur constatation la plus surprenante et importante :

La trajectoire la plus fréquente était que le symptôme était resté sans diagnostic, ce qui suggère la nécessité d’avoir des approches cliniques et des programmes de formation sur les soins pour les symptômes euxmêmes, et pas seulement dans le but d’en arriver à un diagnostic5.

Même si l’étude avait quelques limitations, notamment sa petite taille et sa réalisation dans un milieu géographique donné, la perspective qu’il y ait à l’avenir des études plus exhaustives sur la douleur abdominale et d’autres symptômes courants vus en médecine familiale augure bien pour l’approfondissement de notre connaissance des symptômes qui, jusqu’à présent, étaient un aspect mal compris de notre sagesse pratique.

* Le Dr Martin Bass était un collègue des Drs Thomas R. Freeman et Moira Stewart au Département de médecine familiale de l’Université Western à London (Ontario). J’ai utilisé sa magnifique et inspirante citation dans un éditorial antérieur.

Les opinions exprimées dans les éditoriaux sont celles des auteurs. Leur publication ne signifie pas qu’elles soient sanctionnées par le Collège des médecins de famille du Canada.

This article is also in English on page 305. Références à la page 305.

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