Lasthme leger chez les adultes et les adolescents: Inhalateurs, adhesion et optimisation

L’asthme est un problème commun au Canada, et sa prévalence s’élève à 10,8 %1. Malheureusement, l’asthme est mal contrôlé chez au moins la moitié des patients1. Puisque l’asthme est fréquemment observé en milieu de soins primaires, les médecins de famille sont bien placés pour optimiser la prise en charge de ce problème et améliorer les résultats.

Au cours des dernières années, de nouvelles études repères ont été publiées, les lignes directrices canadiennes sur l’asthme ont été actualisées, et de nouveaux dispositifs et produits pharmaceutiques pour l’asthme ont reçu une homologation. Cet article met en évidence certaines actualisations applicables aux soins primaires.

Présentation du cas

Bobby est un garçon (pronoms il et lui) de 14 ans qui est votre patient depuis sa naissance. Il y a 18 mois, vous avez diagnostiqué l’asthme chez lui. Il vient aujourd’hui avec ses parents pour un bilan de santé.

Bobby prend 125 μg de propionate de fluticasone 2 fois par jour, par aérosol doseur (AD). Il utilise aussi 100 μg de salbutamol de secours par AD (2 bouffées au besoin, jusqu’à concurrence de 4 fois par jour). Lorsque vous l’avez vu il y a un an, vous lui avez remis une prescription de propionate de fluticasone, renouvelable pendant 12 mois, et de salbutamol, renouvelable 4 fois. Bobby vous dit qu’il a épuisé ses ordonnances pour les 2 médicaments. Il affirme qu’il rate rarement sa dose du « contrôleur orange ».

Bobby n’a pas d’autres problèmes de santé et n’a jamais été hospitalisé pour l’asthme. Dans l’ensemble, il a l’impression que son asthme est bien contrôlé.

Évaluer le contrôle de l’asthme

En 2021, la Société canadienne de thoracologie a publié de nouvelles lignes directrices pour la prise en charge de l’asthme. Ces lignes directrices redéfinissent le bon contrôle de l’asthme en rendant plus stricts les indicateurs de contrôle. Par exemple, un nouvel objectif pour l’asthme bien contrôlé est de n’avoir besoin que de 2 doses de secours ou moins par semaine2. Cette quantité inclut les doses prises avant l’exercice. (Les lignes directrices permettaient antérieurement 3 doses de secours par semaine et excluaient les doses préalables à l’exercice3). Le Tableau 1 résume les indicateurs clés d’un asthme bien contrôlé2.

Tableau 1.

Certains indicateurs d’un asthme bien contrôlé

Les lignes directrices canadiennes suggèrent un moyen pratique pour évaluer le contrôle de l’asthme, soit le suivi de la fréquence du renouvellement des ordonnances. En général, le renouvellement des ordonnances d’un inhalateur de secours plus de 2 fois par année indique que le contrôle de l’asthme devrait être réévalué2. Dans la récente étude de cohortes SABINA (SABA Use in Asthma), les patients qui renouvelaient leurs prescriptions de cartouches de β-agonistes à courte durée d’action (BACA) au plus 2 fois par année semblaient moins vulnérables à une exacerbation de l’asthme ou à une hospitalisation liée à l’asthme4. En outre, les patients qui renouvelaient leur ordonnance pour obtenir 11 cartouches de BACA ou plus par année étaient à risque plus élevé (30 fois plus) de mortalité due à l’asthme par rapport aux patients qui faisaient exécuter leur ordonnance pour 2 cartouches de BACA ou moins par année4. Certains praticiens pourraient choisir de limiter le nombre de renouvellements d’une ordonnance de BACA pour favoriser une réévaluation rapide.

De retour à Bobby

Bobby a renouvelé son ordonnance de salbutamol 4 fois au cours de la dernière année. Chaque cartouche de salbutamol contient 200 bouffées chacune, et il utilise 2 bouffées chaque fois qu’il a des symptômes. Cela signifie que, l’an dernier, Bobby a probablement utilisé environ 400 doses de salbutamol ou, en moyenne, 1 dose par jour. Vous demandez à Bobby si c’est une description juste de son utilisation du salbutamol, et il en convient.

L’asthme de Bobby n’est pas bien contrôlé. Par ailleurs, avant d’augmenter la thérapie, vous demandez à Bobby de faire la démonstration de sa technique d’inhalation à l’aide d’un inhalateur avec placebo que vous a fourni la section locale sans but lucratif de l’Association pulmonaire canadienne. Vous remarquez qu’il prend une aspiration rapide et courte lorsqu’il inhale à même son AD (plutôt qu’une aspiration lente et constante). Vous voyez aussi qu’il déclenche son inhalateur avant d’aspirer.

Adapter les types d’inhalateurs à la personne

Il peut être difficile d’individualiser les inhalateurs pour l’asthme, parce que de nombreux nouveaux produits ont fait leur apparition sur le marché canadien au cours des dernières années. Au Tableau 2 se trouve un résumé de certaines des différences entre les corticostéroïdes inhalés (CSI) actuellement disponibles au Canada5. Il n’existe pas d’inhalateur universellement parfait pour tous les patients.

Tableau 2.

Comparaison des corticostéroïdes inhalés disponibles au Canada

Les compteurs de doses aident les patients à savoir quand renouveler leurs inhalateurs. De nombreux AD n’ont pas de compteur de doses, ce qui est déplorable, parce que les AD continuent de produire des activations même une fois « vides ». Ce phénomène est appelé « l’épuisement graduel » et peut se traduire par la libération d’une dose thérapeutique sous-optimale pour le patient. Il convient de signaler que pour savoir combien il reste de doses thérapeutiques, le fait d’« écouter » si un AD fait un bruit en le secouant ou de faire « le test de flottaison » ne fonctionne pas6-12.

Les inhalateurs à poudre sèche (IPS) sont activés par la respiration. Ce dispositif peut aider les patients qui ont de la difficulté à synchroniser l’activation de leur inhalateur (un problème commun avec les AD). Les inhalateurs à poudre sèche exigent une aspiration rapide et profonde pour transformer la poudre en aérosols; tous les patients (p. ex les très jeunes et les très âgés) ne sont pas physiquement capables de le faire. Pour les patients qui ont besoin d’un AD, il est habituellement recommandé d’utiliser une chambre d’espacement pour réduire les erreurs de synchronisation.

L’empreinte carbone importante des AD a récemment reçu une attention nationale13. Les propulseurs dans les AD, y compris les hydrofluoroalcanes, sont de puissants gaz à effet de serre. Selon une estimation, l’utilisation d’un AD chaque mois pendant 1 an a un impact environnemental équivalent à la conduite d’une automobile sur 3200 km14. Dans l’ensemble, les AD ont une empreinte carbone de 20 à 30 fois plus importante que les IPS15.

Le coût par mois d’un CSI à faible dose varie entre 15 et 55 $5. Le coût des inhalateurs augmente avec la dose; le coût mensuel d’un CSI à forte dose se situe entre 60 et 100 $5. Fait à signaler, de 80 à 90 % de l’efficacité d’un CSI est obtenue par de faibles doses16.

Certaines données étayent le fait que les CSI à biodisponibilité plus faible (et, par conséquent, à absorption systémique moins grande) sont associés à moins d’événements indésirables6,7,9,17-20. Par exemple, les agents à biodisponibilité élevée, comme le budésonide et la béclométhasone, semblent raccourcir davantage la taille chez les enfants (p. ex. d’environ 1 cm) que les agents à faible biodisponibilité, comme le fluticasone21.

Enfin, pour certains patients, le choix d’un CSI dont la posologie est de 1 fois par jour pourrait aider à améliorer l’adhésion par rapport à un schéma posologique de 2 fois par jour.

De retour à Bobby

La technique d’inhalation de Bobby est sous-optimale. Plutôt qu’augmenter le traitement pour en arriver à un meilleur contrôle de l’asthme, vous décidez d’essayer d’abord de corriger sa technique d’inhalation.

Les parents de Bobby sont vivement en faveur de réduire l’impact environnemental de ses aérosols doseurs. Ils aiment aussi l’idée d’une seule dose par jour. C’est pourquoi vous changez sa médication pour la mométasone (au lieu du propionate de fluticasone) et la terbutaline (plutôt que le salbutamol). Vous espérez aussi que le changement pour un IPS contribuera aussi à améliorer la technique d’inhalation de Bobby. Les parents de Bobby sont aussi heureux d’apprendre que ces 2 inhalateurs sont munis de compteurs de doses; avant, ils ne faisaient que « deviner quand il fallait renouveler l’ordonnance ». Sur la nouvelle prescription de Bobby, vous écrivez au pharmacien pour lui demander de bien vouloir enseigner au patient la technique d’inhalation.

Trois mois plus tard, Bobby vient vous voir pour une réévaluation. Vous êtes content d’apprendre qu’il a maintenant rarement besoin d’une dose de secours. Les parents de Bobby vous disent qu’ils connaissent un de ses amis à qui le médecin a prescrit du budésonide-formotérol au besoin pour son asthme et qu’il semble que cela fonctionne bien pour cet enfant. Les parents de Bobby souhaitent limiter son exposition à des stéroïdes, parce qu’il n’a pas encore fini de grandir. Ils se demandent si le budésonide-formotérol au besoin conviendrait à Bobby.

Éléments à considérer avec le budésonide-formotérol au besoin

En 2019, Santé Canada a approuvé l’utilisation du budésonide-formotérol au besoin chez les patients de 12 ans et plus souffrant d’un asthme léger persistent22. Cette homologation se fondait sur les essais repères SYGMA (Symbicort Given as Needed in Mild Asthma)23,24. Dans ces études, le budésonide-formotérol au besoin était tout aussi efficace que le budésonide 2 fois par jour pour prévenir les exacerbations de l’asthme. Les patients dans ces essais utilisaient en moyenne le budésonide-formotérol de 3 à 4 fois par semaine, ce qui se traduisait par une réduction globale de l’exposition à des stéroïdes par rapport au budésonide 2 fois par jour.

Il y a cependant d’importantes mises en garde à communiquer au sujet des essais SYGMA. La première est que le budésonide-formotérol au besoin a eu pour résultat un moins bon contrôle global de l’asthme que le budésonide 2 fois par jour (p. ex. environ 5 semaines de moins par année d’asthme bien contrôlé)23. En deuxième lieu, les taux d’effets indésirables couramment liés aux CSI, comme le muguet buccal et la dysphonie, n’étaient pas signalés dans les études23,24. Troisièmement, la durée des études (1 an) était trop courte pour évaluer adéquatement les différences potentielles entre les groupes dans les effets indésirables à long terme, le remodelage des voies aériennes et le contrôle inflammatoire.

Les lignes directrices canadiennes recommandent un CSI à horaire fixe (avec un BACA au besoin) comme option à privilégier pour les patients souffrant d’un asthme léger2. Pour les patients de 12 ans et plus ayant un asthme léger qui ont de la difficulté à se conformer à leur posologie de CSI malgré l’éducation et le soutien, il est possible d’envisager le budésonide-formotérol au besoin.

Résolution du cas

Vous expliquez aux parents de Bobby que son asthme est actuellement bien contrôlé et qu’un changement vers le budésonide-formotérol au besoin aurait probablement pour effet un moins bon contrôle global de son asthme. Vous faites aussi remarquer que Bobby prend maintenant un CSI dont l’absorption systémique est faible (mométasone) et que le budésonide dans l’association budésonide-formotérol serait plus facilement absorbé systémiquement que la mométasone. Enfin, vous leur rappelez qu’auparavant, Bobby utilisait une dose de secours presque tous les jours de la semaine; des données probantes font valoir qu’il aurait par conséquent besoin de prendre du budésonide-formotérol la plupart des jours de la semaine23. Les parents de Bobby sont rassurés et sont d’accord avec votre recommandation de continuer avec la mométasone 1 fois par jour. Ils indiquent aussi que Bobby semble tolérer mieux l’exercice depuis qu’il a changé d’inhalateurs et ils ne veulent pas perdre ce bienfait.

Conclusion

De nombreux patients asthmatiques croient que leur asthme est bien contrôlé et sont surpris d’apprendre qu’ils surutilisent leurs inhalateurs de secours. Pour aider à bien suivre le contrôle de l’asthme, il est bon de repérer les patients qui renouvellent leurs ordonnances d’inhalateurs de secours plus de 2 fois par année. Il est difficile de choisir le bon inhalateur pour l’asthme, mais il peut être utile de chercher, à l’aide d’une prise de décision partagée, les caractéristiques des inhalateurs qui importent le plus à la personne et lui conviennent le mieux (p. ex. compteur de doses, activation par respiration, empreinte carbone, coût, biodisponibilité, schéma posologique). Le budésonide-formotérol au besoin est une option appropriée pour les patients de 12 ans et plus dont l’asthme est léger et qui ne se conforment pas aux indications de leurs CSI; par ailleurs, les CSI à horaire fixe sont préférables en raison de leur meilleur contrôle de l’asthme. Des feuillets d’information à l’intention des patients et d’autres outils cliniques sont disponibles gratuitement en anglais à https://www.rxfiles.ca/asthma.

Footnotes

Remerciements

Nous remercions Loren Regier et Taylor Provencher pour leur aide dans la révision du manuscrit.

Intérêts concurrents

Le Programme de formation continue en pharmacothérapie RxFiles est financé par l’intermédiaire d’une subvention des Autorités sanitaires de la Saskatchewan à l’Université de la Saskatchewan; les recettes additionnelles « sans but lucratif ni perte de bénéfice » proviennent de la vente de livres et des abonnements en ligne. Aucune aide financière n’a été obtenue pour cette publication.

Cet article donne droit à des crédits d’autoapprentissage certifiés Mainpro+. Pour obtenir des crédits, allez à https://www.cfp.ca et cliquez sur le lien vers Mainpro+.

The English version of this article is available at https://www.cfp.ca on the table of contents for the August 2022 issue on page 595.

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